le 29 janvier 2021

L’honorable Diane Lebouthillier, C.P., députée
Ministre du Revenu national
555, avenue Mackenzie, 7e étage
Ottawa ON  K1A 0L5

Madame la Ministre Lebouthillier,

Nous sommes deux préparateurs bénévoles de déclarations de revenus et de prestations dans le cadre du Programme communautaire des bénévoles en matière d’impôt (PCBMI) de l’Agence du revenu du Canada (ARC).  Nous vous écrivons pour vous faire part de notre crainte que, sans changements importants par rapport aux procédures et pratiques adoptées en 2020 pour l’année d’imposition 2019, l’expérience du PCBMI cette année ne sera pas sensiblement différente de celle de l’an dernier.

Comme vous le savez, les activités du PCBMI pour l’année d’imposition 2019 (c.-à-d. la saison des impôts en 2020) ont été gravement perturbées par les restrictions de santé publique liées à la COVID.  L’ARC a signalé en décembre dernier qu’à la mi-mai 2020, le PCBMI n’avait réussi à desservir que 55 p.c. des personnes et des familles à revenu faible ou modeste qui avaient été desservies l’année précédente.

Bon nombre des personnes et des familles qui n’ont pas pu avoir accès aux services du PCBMI ont peut-être dû payer un fournisseur de services commerciaux.  (Un très gros fournisseur commercial facture au moins 115 $ aux personnes à faible revenu pour ce service.)  Beaucoup d’autres n’étaient pas en mesure de produire leur déclaration au début du mois de septembre et ont perdu les prestations conditionnelles à la production d’une déclaration à compter du 1^er octobre.  Certaines de ces personnes ont par la suite reçu une demande de remboursement de l’ARC pour certaines des prestations qu’elles avaient été avancées pour la période de juillet 2020 à juin 2021.

Le gouvernement du Canada a reconnu que le PCBMI est une initiative importante à l’appui des objectifs de réduction de la pauvreté énoncés dans sa Stratégie de réduction de la pauvreté de 2018.  Lorsque le PCBMI est handicapé, cela a une incidence directe sur la capacité du gouvernement de poursuivre ses propres objectifs.

Pour au moins deux raisons, nous prévoyons que la prochaine saison des impôts sera également difficile pour le PCBMI.  Premièrement, les comptoirs du PCBMI seront assujettis aux mêmes restrictions de santé publique liées à la COVID qu’en 2020.  Les organismes d’accueil sont peut-être mieux préparés que la saison dernière pour offrir des services gratuits de production des déclarations.  Mais les modèles qu’ils doivent employer à juste titre, pour se conformer aux restrictions en matière de santé publique, exigent beaucoup plus de travail pour le personnel et les bénévoles que le modèle traditionnel de comptoirs d’impôt du PCBMI.  Comme par les années précédentes, ces organismes d’accueil devront puiser entièrement dans leurs propres ressources pour mettre sur pied et gérer ces comptoirs.  (Les organismes d’accueil dont les demandes de financement sont acceptées dans le cadre du nouveau programme de subventions de l’ARC ne recevront leurs subventions qu’à l’automne et les petits montants reçus ne réduiront pas considérablement les coûts qu’ils doivent assumer pour offrir ces comptoirs d’impôt gratuits.)  Compte tenu de ces contraintes, nous ne voyons pas comment les organismes d’accueil du PCBMI pourront atteindre le nombre de clients qu’ils ont servis au cours des années précédant la crise de la COVID.

Deuxièmement, contrairement à 2020, où l’ARC a accordé beaucoup de latitude pour produire la déclaration sans pénalité après la date limite traditionnelle du 30 avril, à l’heure actuelle, l’ARC n’a donné aucune indication qu’elle modifiera la date limite de production traditionnelle du 30 avril pour assurer la continuité au-delà de juin 2021 des nombreuses prestations, comme l’Allocation canadienne pour enfants, qui sont conditionnelles à la production d’une déclaration à jour.

Bien que l’ARC ne soit peut-être pas en mesure de résoudre le premier problème, elle a tout à fait le pouvoir pour régler le deuxième problème.  Nous espérons que l’ARC prévoit maintenant la possibilité que de nombreux particuliers et familles à faible revenu ne puissent pas produire de déclaration dans les comptoirs d’impôt du PCBMI ou les services commerciaux avant la date limite du 30 avril.  Il pourrait s’agir de mettre en place des procédures pour prolonger les prestations et les crédits comme le crédit pour TPS en juillet, comme on l’a fait l’an dernier, pour les personnes dont la déclaration n’a pas été produite à temps pour respecter la date limite du 1^er juillet.  Cela pourrait également comprendre des discussions avec les provinces et les territoires sur la prise d’un arrangement semblable pour les prestations et les crédits que l’ARC administre en leur nom.

Cette prolongation pourrait être accordée pour une période supplémentaire, disons de trois mois, au-delà de la date limite traditionnelle, afin de permettre aux personnes à faible revenu de produire leur déclaration avant qu’elles ne soient exclues des prestations et des crédits normalement conditionnels à leur déclaration.  Bien que l’ARC ne veuille pas faire connaître cette prolongation à l’avance, elle pourrait la faire savoir à ceux qui n’ont pas réussi à produire leur déclaration avant la date limite habituelle lorsqu’elle accorde une prolongation de leurs prestations et crédits.

Au cours de l’année dernière, nous avons trouvé des cas de clients du PCBMI qui ont produit leur déclaration très tard et qui avaient, entre-temps, reçu une lettre de l’ARC exigeant le remboursement d’avances de prestations et de crédits qu’ils avaient reçus après juin 2020.   Lorsque nous avons demandé aux agents de l’ARC ce que ces clients du PCBMI devraient faire, on nous a dit que nos clients pouvaient ignorer la demande de remboursement. Comme vous pouvez l’imaginer, c’était très déroutant pour nos clients du PCBMI, dont certains ont déjà de mauvaises expériences avec l’ARC.  Pour les personnes qui n’ont pas produit leur déclaration avant la date limite traditionnelle ou la fin de la prolongation, l’ARC devra trouver une approche meilleure, plus claire, cette année pour communiquer les répercussions de la non-production d’une déclaration.

Nous espérons que l’ARC jouera son rôle pour veiller à ce que les personnes et les familles à faible revenu, qui sont déjà gravement touchées par la COVID, ne soient pas encore plus touchées en raison de difficultés à produire des déclarations en vertu des restrictions de santé publique liées à la COVID.

En tant que ministre du Revenu national, nous espérons que vous vous assurerez que l’ARC administre son Programme de prestations d’une manière qui favorise de façon proactive les objectifs de réduction de la pauvreté du gouvernement.

Veuillez recevoir, Madame la Ministre, nos salutations distinguées.

Jonathan Rothschild                                  Bill Singleton