COMBIEN DE PERSONNES N’ONT PAS PRODUIT DE DÉCLARATION POUR 2021 ?

1er août 2023


Il s’agit du premier article d’une série en trois parties.  Cet article soutient que, même si le nombre de non-déclarants actuels n’est peut-être pas aussi élevé que certaines estimations populaires, il est encore très élevé et représente un sérieux frein aux objectifs de réduction de la pauvreté du gouvernement fédéral.  Les deux prochains articles proposeront les éléments d’une stratégie selon laquelle l’ARC pourrait utiliser plus efficacement le PCBMI pour réduire le nombre de non-déclarants, contribuant ainsi de façon importante à la réduction de la pauvreté.

Estimations antérieures des non-déclarants

Le document du budget fédéral de 2023 indique que 10 à 12 % des résidents canadiens admissibles à produire une déclaration ne le font pas.  Bien que le document ne donne pas la source de cette estimation, nous croyons qu’elle est basée sur un article largement cité par Robson et Schwartz, publié en 2020.  Le nombre calculé par Robson et Schwartz est basé sur les données de l’année d’imposition 2015.  Est-il raisonnable de supposer que les taux de non-déclarants en 2023 demeureront les mêmes qu’en 2015?

Les données tirées d’un article publié en 2022 par Laurin et Dahir à l’Institut CD Howe suggèrent le contraire.  En utilisant une méthode différente, ils estiment que le taux pour les non-déclarants en 2015 était de 4,5 % des résidents canadiens admissibles à produire une déclaration.  C’est moins de la moitié de l’estimation fournie par Robson et Schwartz.  Mais ils fournissent également des estimations pour 2016 (4,7 %), 2017 (4,5 %), 2018 (4,3 %) et 2019 (4,2 %) qui, prises ensemble, suggèrent que le taux de non-déclarants pourrait avoir diminué depuis 2015.

Une estimation plus récente

Bien entendu, les désaccords sur les méthodes employées pour estimer les taux de non-déclarants sont au centre des différents résultats obtenus par ces chercheurs.

Ici, nous utilisons une méthodologie intuitivement simple employée par Robson et Schwarz pour estimer le taux de non-déclarants pour 2021.  Au début de leur article de 2020, Robson et Schwartz déclarent:

« Une approche, en travaillant avec des données accessibles au public, pourrait consister à comparer le nombre de déclarations reçues avec la taille de la population du sous-groupe d’intérêt pour une année d’imposition donnée … [N]ous comparons le nombre de déclarations pour 2016 selon le sexe, l’âge et la province ou le territoire de résidence avec le nombre de Canadiens âgés de 15 et plus, selon les estimations officielles de la population.  Il en résulte un taux national de non-déclarants estimé à 9,3 pour cent, avec des taux plus élevés chez les hommes, les résidents des territoires et les jeunes Canadiens. »

Ce qui suit est un bref exposé utilisant la même méthodologie pour estimer le taux de non-déclarants pour 2021.

  1. Selon le recensement de 2021, 36 991 981 personnes vivaient au Canada en 2021.
  2. Le recensement n’indique pas le nombre de toutes les personnes de moins de 18 ans.  Il donne plutôt des regroupements avec 0-14 ans d’âge étant le plus proche.  Supposons que personne dans ce groupe n’a besoin de produire une déclaration.  Cela fait 6 012 795 personnes.  Il reste donc 30 979 186 personnes âgées de 15 ans et plus en 2021.
  3. Supposons que tous les membres de ce dernier groupe sont admissibles à produire une déclaration.  (Il s’agit d’une hypothèse généreuse, car il est probable que de nombreux jeunes de 15 à 17 ans n’ont pas besoin de produire une déclaration, car ils n’ont pas de revenu imposable.)  Comment ce nombre se compare-t-il au nombre de déclarations produites pour l’année d’imposition 2021?
  4. Les statistiques de l’ARC pour la saison de production des déclarations de revenus 2023 montrent les données de production des déclarations de revenus des particuliers pour les saisons d’imposition précédentes.  Il y a deux tableaux à ce sujet.  L’un correspond au nombre total de déclarations traitées pendant la saison des impôts.  L’autre correspond au nombre total de déclarations traitées pour l’année en cours.  Ce dernier tableau montre que pour la saison des impôts 2022 (l’année dernière), il y avait 29 488 759 déclarations de revenus des particuliers produites pour l’année d’imposition 2021.
  5. La différence entre les deux chiffres ci-dessus est de 1 490 427.  Cela représente 4,8 % des personnes âgées de 15 ans et plus en 2021 qui n’ont pas produit de déclaration pour l’année d’imposition 2021.  (N’oubliez pas qu’il s’agit d’une estimation généreuse du nombre de personnes qui n’ont pas produit de déclaration en 2021, car nous comptons tous les jeunes de 15 à 17 ans comme admissibles à la production de déclarations.)

Il y a deux contre-arguments qui pourraient être faits.  Premièrement, certains de ces jeunes de 15 à 17 ans pourraient devoir produire une déclaration parce qu’ils gagnaient un revenu imposable.  Mais aucun ne sera admissible à recevoir des prestations.  Deuxièmement, les chiffres du recensement auraient pu sous-estimer le nombre total de Canadiens.  Peut-être, mais la sous-estimation n’est pas susceptible d’être importante.  Quoi qu’il en soit, toute sous-estimation est compensée par l’inclusion de tous les jeunes de 15 à 17 ans dans l’estimation.

Et alors ?

Pour répéter, en utilisant la même méthodologie pour 2016, Robson et Schwarz ont constaté un taux de non-déclarants (9,3 %) pour 2016, ce qui représente presque le double du taux de non-déclarants (4,8 %) que nous trouvons ci-dessus pour 2021.  Cela donne à penser que la conclusion de Laurin et Dahir selon laquelle le taux de non-déclarants diminue au fil du temps est raisonnable.

Toutefois, cela signifie qu’environ 1,5 million de Canadiens admissibles n’ont pas produit de déclaration pour 2021.  La grande majorité d’entre eux étaient des Canadiens à faible revenu.  (Il est difficile de concevoir qu’une grande proportion de ces non-déclarants étaient de riches Canadiens qui fuyaient le paiement de leur impôt sur le revenu.)  Ces Canadiens ont donc été privés d’un grand nombre de prestations fédérales et provinciales ou territoriales, dont bon nombre sont fondées sur le revenu, conçues spécifiquement pour réduire leur pauvreté.  C’est parce que le paiement de la plupart de ces prestations fédérales et provinciales ou territoriales est conditionnel à la production d’une déclaration.

Compte tenu de l’objectif de 2030 pour sa Stratégie de réduction de la pauvreté de 2018, le gouvernement fédéral devrait s’inquiéter du fait qu’un si grand nombre de Canadiens à faible revenu ne produisent toujours pas de déclaration.  Comme nous l’avons montré dans un article récent, la réponse de l’ARC à ce problème – une campagne annuelle de rédaction de lettres dans laquelle les non-déclarants sont informés des avantages de produire une déclaration – a produit des résultats épouvantables.  Le document du budget fédéral de 2023, mentionné au début de cet article, citait le taux (désuet) de 10 à 12 % pour les non-déclarants pour justifier l’élargissement de l’admissibilité à son service « Produire ma déclaration » et pour mettre à l’essai la production automatique des déclarations de revenus et de prestations.  Pourtant, nous avons soutenu dans un article précédent qu’aucune de ces initiatives n’entraînera une réduction importante du nombre de non-déclarants.

Dans les deux articles suivants, nous décrivons les éléments d’une stratégie selon laquelle l’ARC pourrait utiliser plus efficacement le PCBMI pour réduire le nombre de non-déclarants, contribuant ainsi de façon importante à la réduction de la pauvreté.

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