28 août 2023
Dans un article précédent, nous avons soutenu que le PCBMI ne sert pas suffisamment les pauvres du Canada. Compte tenu de la capacité d’exécution très limitée du PCBMI, nous croyons que la meilleure façon de servir un plus grand nombre de pauvres est de mieux cibler les opérations du PCBMI. Par cela, nous entendons à la fois tendre la main à des groupes spécifiques pour les encourager à utiliser le service et une plus grande sélectivité à qui le service est fourni.
Le but de cet article est de décrire où l’on peut trouver des données sur la pauvreté au niveau de la municipalité et comment les données pourraient être utilisées pour améliorer les efforts pour atteindre ceux qui ont le plus besoin de ce service gratuit.
Les données provinciales et territoriales confirment le faible rendement du PCBMI pour atteindre les pauvres
Dans notre article précédent sur la couverture du PCBMI, nous n’avons examiné que la situation nationale. Avant de décrire où l’on peut trouver des données sur la pauvreté pour chaque municipalité canadienne, nous examinons brièvement les données à l’échelle provinciale et territoriale. La répartition la plus récente de la pauvreté par province disponible auprès de Statistique Canada est pour 2020.
Les statistiques du PCBMI de l’ARC pour la saison des déclarations de revenus de 2021 reflètent la production des déclarations pour l’année d’imposition 2020, sur laquelle les données sur la pauvreté de Statistique Canada sont fondées.
Nous faisons deux hypothèses :
- Tous les particuliers aidés par le PCBMI en 2021 ont produit une déclaration au moins pour l’année d’imposition 2020 (dans laquelle leur revenu a été fourni). Cela est raisonnable, car la plupart des clients se concentrent principalement sur la production de l’année en cours. (Certains peuvent également produire des déclarations pour des années antérieures, ce qui explique pourquoi le nombre de déclarations remplies dépasse généralement le nombre de personnes aidées.)
- Tous les particuliers aidés par le PCBMI en 2021 avaient des revenus inférieurs au seuil de pauvreté officiel de leur région en 2020. Il s’agit d’une hypothèse très généreuse, car les plafonds de revenu recommandés par l’ARC pour l’admissibilité aux services du PCBMI demeurent supérieurs aux seuils de pauvreté officiel de nombreuses régions ; cela signifie que certaines personnes desservies par le PCBMI n’étaient pas pauvres.
Ci-dessous, nous calculons le pourcentage de pauvres dans chaque province et territoire qui ont reçu le service du PCBMI.
Voici quelques notes explicatives importantes pour les chiffres dans le tableau ci-dessus.
- Les estimations de la pauvreté pour le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest sont tirées d’un document récemment publié par Statistique Canada.
- La mesure de la pauvreté fondée sur un panier de consommation pour le Nunavut, sur laquelle repose le seuil de pauvreté officiel, n’a pas été finalisée et, par conséquent, les estimations de la pauvreté pour 2020 ne sont pas encore disponibles.
- Le nombre total de personnes desservies par le PCBMI en 2021 exclut les personnes servies à l’extérieur du Canada et les personnes qui ne sont pas affectées à une province ou territoire en particulier (« sans objet »).
- Le chiffre national de la pauvreté cité ici pour 2020 (2 895 025) est supérieur de plus de 500 000 à celui donné dans l’Enquête canadienne sur le revenu de 2021 de Statistique Canada pour 2020 (2 357 000). Pourquoi? L’Enquête canadienne sur le revenu, qui établit le taux de pauvreté pour 2020 à 6,4 %, utilise des données antérieures au Recensement de 2021. Cependant, un document de Statistique Canada publié en novembre 2022 utilise les données du Recensement de 2021 pour établir le taux de pauvreté pour 2020 à 8,1 %. Nous utilisons ces données plus récentes de Statistique Canada sur la pauvreté pour 2020. (Nous nous demandons comment et quand Statistique Canada révisera son tableau de bord de la pauvreté pour refléter l’estimation la plus récente du taux de pauvreté de 2020.)
Deux conclusions peuvent être tirées du tableau ci-dessus :
- À l’échelle nationale, le PCBMI n’a servi au mieux qu’un pauvre sur cinq en 2020; et
- La couverture du PCBMI était comparativement meilleure dans les provinces et les territoires à faible population (la seule exception était le Québec – la disponibilité d’incitatifs financiers pour la production de déclarations provinciales, en plus du projet pilote au niveau fédéral offrant des incitatifs financiers peut être une explication possible de ce résultat).
Ces estimations confirment à nouveau notre opinion que le PCBMI ne sert pas suffisamment les pauvres du Canada. Compte tenu de la capacité d’exécution très limitée du PCBMI, nous croyons que la meilleure façon de servir un plus grand nombre de pauvres est de mieux cibler les pauvres. Mais pour ce faire efficacement, les organisations d’accueil ont besoin de données sur la pauvreté au niveau local.
Des données municipales sur le rendement du PCBMI sont nécessaires pour mieux cibler les pauvres
Statistique Canada a créé un site Web où l’on peut trouver des données sur la pauvreté par municipalité.
Idéalement, l’ARC pourrait comparer ces données avec les taux de production du PCBMI dans la même municipalité pour mieux comprendre dans quelle mesure les organismes d’accueil ont bien servi les pauvres pendant la période des impôts de 2021. Si Statistique Canada met à jour ce site Web avec des données plus récentes sur la pauvreté dans les municipalités, l’ARC pourrait alors suivre la tendance de la couverture au fil du temps. Il pourrait élaborer des stratégies, en collaboration avec les organismes d’accueil, pour améliorer la sensibilisation des pauvres dans les municipalités où le taux de couverture est faible et où la tendance ne montre aucune amélioration au fil du temps.
Ce qui précède exige que l’ARC soit proactive. Une deuxième possibilité serait que tous les organismes d’accueil au sein d’une municipalité regroupent leurs chiffres pour les personnes aidées pendant la saison des impôts 2021. (Il n’est pas nécessaire que l’ARC joue un rôle actif en fournissant des données.) Ce chiffre consolidé pourrait ensuite être comparé au chiffre de pauvreté de leur municipalité pour 2020 afin de comprendre dans quelle mesure les pauvres ont été bien servis pendant la saison des impôts 2021. Si des données étaient recueillies sur l’âge et le sexe de leurs clients, cela pourrait également faire partie de la comparaison. De même, il pourrait s’agir d’une étape vers la formulation de stratégies visant à améliorer la sensibilisation des organismes d’accueil auprès des pauvres au sein de la municipalité pour le futur service du PCBMI.
Comment trouver des données sur votre municipalité
Tout d’abord, allez au « Tableau de bord municipal sur la qualité de vie ». Cliquez sur « Profil de la municipalité ». Une fois sur la page « Profil de la municipalité », assurez-vous de choisir la municipalité et la province sur laquelle vous souhaitez en savoir plus à l’aide des menus déroulants. Ensuite, vous verrez vers le haut de la page sur le côté droit, trois options. La valeur par défaut semble être « Besoins en matière de logement », alors cliquez sur « Pauvreté ».
Cela modifie la page pour inclure les informations suivantes :
- Chiffres et taux de pauvreté pour 2020 en utilisant le seuil de pauvreté officiel basé sur la mesure du panier de consommation pour la municipalité
- Le taux de pauvreté pour les différents groupes d’âge et par genre
- Comparaison du taux de pauvreté de la municipalité avec les taux provinciaux ou territoriaux et nationaux
(Un rappel : dans les deux cas, en supposant que toutes les personnes aidées par le PCBMI ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté officiel, on obtient une estimation généreuse du taux de couverture du PCBMI pour servir la population pauvre, car les plafonds de revenu utilisés pour établir l’admissibilité des clients au PCBMI sont généralement supérieurs au seuil de pauvreté officiel.)
Toutefois, ces options supposent que l’ARC et ses organismes d’accueil veulent améliorer l’accès aux services du PCBMI pour ceux qui en ont le plus besoin et sont prêts à prendre les mesures nécessaires pour y parvenir.
Cela se produira-t-il ?
Bien que le gouvernement fédéral mentionne le PCBMI comme l’un de ses principaux programmes contribuant aux objectifs énoncés dans sa Stratégie de réduction de la pauvreté de 2018, rien n’indique que l’ARC considère le PCBMI sous l’angle de la réduction de la pauvreté. Il n’a pas de stratégie explicite pour rendre le PCBMI plus efficace pour rejoindre davantage les pauvres au Canada. Quelque peu décevant, l’ARC semble aller dans la direction opposée, réduisant ses ambitions pour le PCBMI. De plus, l’ARC n’a jamais reconnu dans aucune de ses publications officielles que son administration des prestations fondées sur le revenu ou du PCBMI contribue à la réduction de la pauvreté. Par conséquent, nous ne sommes pas optimistes quant au fait qu’elle sera proactive pour s’assurer que le PCBMI rejoint un plus grand nombre de ceux qui ont le plus besoin de ce service.
Les organismes d’accueil du PCBMI se divisent en deux groupes généraux : ceux qui ont l’autonomisation financière (et, par association, la réduction de la pauvreté fondée sur le revenu) comme leur mandat de base et ceux qui ont un mandat différent, mais qui offrent ce service à leurs clients réguliers ou aux membres d’un groupe défini (p. ex. religion, origine ethnique, orientation sexuelle). Les organismes d’accueil ayant un mandat d’autonomisation financière sont beaucoup moins nombreux que le deuxième groupe. Ainsi, pour qu’il y ait une augmentation substantielle de l’accès des pauvres du Canada aux services du PCBMI, les organismes d’accueil qui n’ont pas d’autonomisation financière ou de réduction de la pauvreté fondée sur le revenu comme leur mandat de base devront prendre les mesures pour y parvenir. Cependant, ils sont peu incités à étendre la prestation des services du PCBMI au-delà de leur capacité actuelle de leur propre initiative. Même la collaboration entre ces organismes d’accueil pour établir des chiffres globaux pour leurs municipalités, sans parler de la coordination, peut être difficile.
Nous nous retrouvons donc avec un casse-tête : comment amener l’ARC à être plus proactive pour s’assurer que le PCBMI rejoint une plus grande partie de la population pauvre au Canada? Bien que le budget de 2018 ait confirmé un quadruplement du budget de l’ARC pour le PCBMI, quelque cinq ans plus tard, il n’y a pas grand-chose à montrer pour cela.