D’abord, l’ARC doit recueillir et analyser les BONNES données

14 juillet 2021


Tel que mentionné dans un article précédent, l’une des priorités de sa lettre de mandat supplémentaire du premier ministre (datée de janvier 2021) enjoint à la ministre du Revenu national « d’élargir et améliorer le Programme communautaire des bénévoles en matière d’impôt».  L’une des choses que l’Agence du revenu du Canada (ARC) peut faire pour y parvenir, c’est de mettre davantage l’accent sur une autre priorité mentionnée dans la même lettre, demandant à la ministre Lebouthillier « d’améliorer la collecte et l’analyse des données désagrégées à propos du soutien et des services offerts par l’ARC. »

Les données doivent être recueillies et analysées pour au moins deux raisons.  Premièrement, pour confirmer si le PCBMI atteint ou non l’objectif visé.  C’est l’objet du premier article.

Deuxièmement, lorsque le PCBMI n’atteint pas l’objectif visé, aider à élaborer des stratégies pour que le programme puisse mieux atteindre l’objectif visé.  C’est le sujet d’un autre article, intitulé « Ensuite, l’ARC doit élaborer une stratégie axée sur l’amélioration de l’EFFICIENCE ».

Collecte et analyse des données sur les résultats du PCBMI

Premièrement, les données doivent être recueillies et analysées pour confirmer si le PCBMI atteint ou non les objectifs visés.  Il peut sembler évident de le dire, mais il faut recueillir des données qui sont réellement pertinentes pour les résultats que le PCBMI tente d’obtenir.

Nous croyons que l’ARC recueille, analyse et publie les mauvaises  données.  Le problème, c’est que les données que l’ARC publie sur les résultats qu’elle obtient par l’entremise du PCBMI ne sont pas pertinentes aux objectifs visés par le PCBMI.

Le PCBMI vise à aider les personnes à revenu faible ou modeste, et particulièrement les personnes vulnérables, à produire leur déclaration de revenus et de prestations.

Pour montrer dans quelle mesure le PCBMI atteint cet objectif, l’ARC a commencé en 2012 à déclarer le nombre de déclarations remplies par l’entremise du PCBMI.   En 2017, à la suite d’une décision stratégique touchant tous les ministères et organismes fédéraux, l’ARC a choisi le nombre de déclarations remplies comme indicateur de rendement pour le PCBMI.  En 2019, l’ARC est passé au nombre de personnes assistées comme indicateur de rendement pour le PCBMI.

Nous avons expliqué ailleurs pourquoi nous pensons que les données sur le nombre de déclarations remplies et le nombre de personnes assistées sont mal adaptées pour dire à l’ARC dans quelle mesure le PCBMI fonctionne bien par rapport à son objet.

L’ARC a besoin d’indicateurs de rendement plus appropriés qui lui permettent de déterminer le rendement du PCBMI.  Nous avons déjà identifié quatre indicateurs qui, à notre avis, répondent à ce besoin :

  1. Le pourcentage de la population qui se situe sous le seuil officiel de la pauvreté et qui ne produisent pas de déclaration
  2. Le pourcentage de clients du PCBMI qui se situent sous le seuil officiel de la pauvreté et qui ont été classés l’année précédente comme des non-déclarants
  3. Le pourcentage de clients du PCBMI qui se situent sous le seuil officiel de la pauvreté
  4. Le pourcentage de la population qui se situe sous le seuil officiel de la pauvreté et qui n’est pas client du PCBMI

Il y a deux sources des données qui se trouvent derrière ces indicateurs.  Statistique Canada possède des données des recensements.  L’autre est l’ARC elle-même, d’après les renseignements qu’elle recueille dans les déclarations de revenus et de prestations.

Des tendances se dégageraient des données recueillies d’une année à l’autre sur chacun de ces indicateurs.  L’analyse de ces tendances révèlerait si l’ARC fait des progrès dans les domaines suivants :

  • réduire le pourcentage de population sous le seuil de pauvreté qui ne produit pas de déclaration
  • augmenter le pourcentage de clients du PCBMI qui se trouvent sous le seuil de pauvreté et qui ont été classés l’année précédente comme des non-déclarants
  • augmenter le pourcentage de clients du PCBMI qui se situent sous le seuil de pauvreté
  • réduire le pourcentage de la population qui se situent sous le seuil de pauvreté et qui n’est pas client du PCBMI

Au fil du temps, les résultats sur ces quatre indicateurs pourraient aider à clarifier les priorités pour les mesures futures de l’ARC (c.-à-d. la stratégie) afin de mieux s’assurer que le PCBMI atteindra (ou continuera d’atteindre) l’objectif visé.  Cela sera particulièrement important au niveau infranational, pour repérer les endroits où les performances sont insuffisantes.  (L’utilisation de chiffres sera aussi importante que les pourcentages pour aider à orienter les décisions, car certaines régions avec de faibles pourcentages, mais des nombres élevés peuvent nécessiter une plus grande attention que d’autres régions ayant des pourcentages élevés, mais des nombres faibles.)

Il s’agit de la première priorité en matière de données pour l’ARC : commencer à recueillir et à analyser les bonnes données sur les clients du PCBMI sur la base de l’information dans leurs déclarations et dans le recensement de Statistique Canada.  Jusqu’à ce que l’ARC commence à le faire, elle ne saura pas si elle atteint l’objectif du PCBMI.

De plus, nous croyons que l’ARC doit publier ces données pour montrer les résultats obtenus par le PCBMI. Dans un autre article, nous donnons quatre raisons pour lesquelles nous pensons qu’elle devrait le faire.

Cependant, l’ARC fait fausse route, même sur ce front.  Étonnamment, à compter de l’exercice 2021-2022, l’ARC a indiqué qu’elle n’utilisera plus d’indicateur de rendement pour rendre compte des résultats liés au PCBMI. Cela signifie qu’il n’y aura pas de données accessibles au public sur le PCBMI.

Collecte et analyse des données sur l’infrastructure de prestation du PCBMI

Pour que le PCBMI obtienne ses résultats, l’ARC compte presque entièrement sur les services gratuits offerts par les organismes d’accueil et leurs bénévoles.   Nous désignerons ici le groupe d’organismes d’accueil et leurs bénévoles comme « l’infrastructure de prestation » du PCBMI.

Si le PCBMI n’atteint pas ses objectifs, des changements doivent être apportés à cette infrastructure.  Par exemple, l’analyse au niveau infranational des résultats obtenus sur les quatre indicateurs mentionnés ci-dessus peut aider à déterminer les endroits où le rendement du PCBMI est particulièrement inférieur aux attentes.  Ces endroits pourraient alors faire l’objet d’interventions visant à améliorer à l’infrastructure de prestation locale.

Comme première étape vers de telles améliorations, l’ARC doit connaître les caractéristiques de l’infrastructure de prestation actuelle du PCBMI.   Cela signifie qu’il faut recueillir et analyser des données sur les caractéristiques des organismes d’accueil et des bénévoles qui fournissent actuellement des services du PCBMI.

Au cours du processus annuel d’inscription au PCBMI qui a lieu avant le début de la nouvelle saison des impôts, l’ARC recueille actuellement beaucoup de renseignements utiles sur les organismes d’accueil et les bénévoles.  Ci-dessous, nous montrons quelques suggestions sur la collecte d’informations et donnons les raisons de nos suggestions.

Il ne fait aucun doute que l’ARC analyse déjà certaines de ces données pour cerner des tendances dans la composition d’une ou de plusieurs caractéristiques des organismes d’accueil ou des bénévoles.

Par exemple, en combinant les données sur les organismes d’accueil selon l’endroit et la période de l’année au cours de laquelle les services du PCBMI sont offerts, l’ARC a peut-être compris dans quelle mesure les endroits sont bien desservis tout au long de l’année grâce aux services du PCBMI.  Au fil du temps, l’ARC peut vérifier si un nombre croissant d’organismes d’accueil dans un endroit précis offrent ces services à longueur d’année.

Encore une fois, en combinant les données sur les bénévoles par organisme d’accueil, l’ARC pourrait avoir déterminé quels bénévoles sont affiliés à plusieurs organismes d’accueil, et ainsi déterminé quels services du PCBMI des organismes d’accueil seraient les plus menacés s’ils perdaient ces bénévoles.

Il s’agit donc de la deuxième priorité de l’ARC en matière de données : améliorer la collecte et l’analyse des données sur l’infrastructure de prestation du PCBMI en fonction des renseignements fournis dans les inscriptions des organismes d’accueil et des bénévoles.

L’ARC fait déjà une partie de ce travail.  Toutefois, il est impossible d’en évaluer la qualité.  Contrairement aux données sur les résultats, nous ne croyons pas que l’ARC soit tenue de publier ses données et son analyse sur les organismes d’accueil et les bénévoles. Bien sûr, ce serait utile à tous ceux qui s’intéressent au PCBMI si l’ARC le faisait.

En principe, l’ARC recueille et analyse des données pour mieux comprendre l’infrastructure de prestation actuelle du PCBMI.  L’ARC doit le faire, à son tour, pour être en mesure de déterminer les améliorations qu’elle doit encourager au sein de l’infrastructure de prestation.  Les choix d’améliorations forment sa stratégie pour le PCBMI.

Dans un article connexe, intitulé « Ensuite, l’ARC doit élaborer une stratégie axée sur l’amélioration de l’EFFICIENCE », nous examinons comment l’analyse des données de l’ARC peut éclairer ses choix. Peu importe les données que l’ARC recueille et analyse, nous soutenons qu’elle fait actuellement le mauvais choix stratégique pour améliorer et élargir le PCBMI.

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