Mise en œuvre du programme pilote de subventions de l’ARC au cours de la première année de trois – un démarrage lent pour rater la cible

6 octobre 2022


En 2021, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a lancé un nouveau programme pilote de subventions qui offre un soutien financier à certains organismes d’accueil du PCBMI.  Lorsqu’il a été présenté, nous avions beaucoup à dire à ce sujet ici.

Le programme pilote a terminé la première de ses trois années.  Comme c’est malheureusement typique de l’ARC dans ses rapports sur le PCBMI, il y a une pénurie d’information sur la première année de ce projet pilote.  Toutefois, un élément d’information important est cité dans le Plan ministériel de l’ARC pour l’exercice 2022-23 :

« Au cours de la première année L’Agence a envoyé un peu moins d’un million de dollars aux organismes admissibles dans l’ensemble du Canada pour appuyer leurs efforts visant à s’assurer que les personnes vulnérables ont la capacité de produire des déclarations de revenus et d’accéder aux prestations et aux crédits conçus pour les soutenir. »

Rappelez-vous que le budget de ce programme pilote de trois ans est de 10 millions de dollars; cela représente en moyenne 3,3 millions de dollars disponibles chaque année pour soutenir les organismes d’accueil.  Dans la phrase qui précède immédiatement celle citée ci-dessus, le Plan ministériel de l’ARC indique :

« L’Agence améliore le Programme communautaire des bénévoles en matière d’impôt (PCBMI). Elle reconnaît les efforts déployés par les organismes communautaires et leurs bénévoles en mettant en place le premier programme de subvention du PCBMI pour les aider à payer les coûts et les encourager à offrir des comptoirs d’impôts gratuits [c’est nous qui soulignons]. »

Dès le début, nous avons mis en doute la capacité d’un programme de subventions aussi sous-financé d’atteindre ces deux objectifs.

Le versement de moins de 1 million de dollars par rapport aux 3,3 millions de dollars disponibles au cours de la première des trois années ne semble peut-être pas trop préoccupant.  (Habituellement, pour l’ARC, aucun autre détail  n’est fourni, de sorte que nous ne savons pas combien de déclarations produites cela représente, combien d’organismes d’accueil ont bénéficié de ces subventions ni quelle était la taille de la subvention médiane.)  Peut-être que le programme pilote a simplement besoin de plus de temps pour mieux se faire connaître.  D’ici la fin de la troisième année, il pourrait débourser beaucoup plus, démontrant ainsi qu’il est en bonne voie d’atteindre les objectifs énoncés de défrayer les coûts des organismes d’accueil qui organisent des comptoirs d’impôt du PCBMI et encourager davantage d’organismes à organiser des comptoirs d’impôt du PCBMI.

Malheureusement, les preuves jusqu’à présent suggèrent qu’il s’agit d’un vœu pieux.

Soit l’ARC a trop budgeté pour le programme pilote …

Lorsque l’ARC a mis sur pied le programme pilote de subventions, elle a alloué un budget de 10 millions de dollars sur trois ans.

Au cours de l’année de pointe du PCBMI (saison des impôts 2019 pour l’année d’imposition 2018), environ 835 000 déclarations ont été produites (y compris pour les années d’imposition antérieures).  Supposons un instant que le programme pilote de subventions ait effectivement fonctionné cette année-là.  Ajoutez à cela plusieurs hypothèses généreuses :

  • L’ARC a payé pour les déclarations d’années antérieures (bien que l’ARC ne compte actuellement que les déclarations produites avec le numéro d’identification de l’organisme pour le PCBMI ou NIOP comme admissibles à la subvention, de sorte qu’aucun crédit n’est accordé pour les déclarations antérieures à 2021 qui sont produites pendant la saison des impôts, car le logiciel n’utilise pas le NIOP avant 2021) ;
  • Tous les organismes d’accueil qui ont produit une déclaration ont été payés (bien que l’ARC ne paie actuellement que pour les déclarations des organismes d’accueil qui se donne la peine de demander et d’obtenir l’approbation de leur demande de subvention par l’ARC) ; et
  • L’ARC a payé 2,50 $ par déclaration produite (bien qu’elle utilise une échelle mobile selon laquelle 2,50 $ est le montant maximal qu’un organisme d’accueil peut recevoir par déclaration).

En appliquant toutes ces hypothèses, l’ARC aurait versé tout au plus un peu moins de 2,1 millions de dollars pour la période des impôts de 2019.  Sur trois ans (la durée de vie du programme pilote de subventions), cela aurait représenté un peu moins de 6,3 millions de dollars.

Au cours de la période des impôts 2020, le nombre de déclarations produites a chuté en raison de l’impact de la COVID et des restrictions sanitaires connexes. Le programme de subventions a été conçu et mis en œuvre à temps pour la période des impôts 2021.  Ainsi, l’ARC savait qu’elle paierait probablement en fonction d’un nombre de déclarations beaucoup plus faible que celui produit au cours de la période des impôts de 2019.  De plus, elle ne paierait que pour les déclarations produites avec le NIOP, c’est-à-dire seulement celles produites pour l’année d’imposition 2020 et les années subséquentes.  Tout cela pour dire que le montant versé, à tout le moins au cours de la première année du programme pilote, serait considérablement inférieur à notre généreuse estimation de 2,1 millions de dollars.

Alors pourquoi l’ARC a-t-elle établi un budget aussi important de 10 millions de dollars ?

… soit l’ARC a prévu de payer trop peu

Revenons un instant à la même expérience de pensée, mais changeons une hypothèse : au lieu de payer 2,50 $ par déclaration produite, l’ARC a payé le montant maximal par déclaration nécessaire pour débourser le budget complet disponible pour cette année.  À 10 millions de dollars sur trois ans, le budget moyen par année serait de 3,3 millions de dollars.  Cela signifie que l’ARC aurait versé 3,95 $ par déclaration produite.

Rappelez-vous, dans notre expérience de pensée, nous sommes incroyablement généreux avec nos hypothèses.  Lorsque l’ARC a conçu et lancé ce programme pilote de subventions, elle savait qu’elle paierait probablement en fonction d’un nombre de déclarations nettement plus faible à celui produit pendant la période des impôts de 2019.  De plus, elle ne paierait que pour les déclarations produites avec le NIOP, c’est-à-dire seulement celles produites pour l’année d’imposition 2020 et les années subséquentes.

Alors pourquoi l’ARC a-t-elle établi un maximum de seulement 2,50 $ par déclaration produite ?

Qu’est-ce que cela signifie pour les deux années restantes ?

Le programme pilote a une durée totale de trois ans.  Il reste donc les périodes d’impôt 2022 et 2023 pour fournir un soutien financier.  Ayant dépensé moins de 1 million de dollars au cours de la première année, il reste plus de 9 millions de dollars disponibles pour débourser au cours des deux prochaines années, soit une moyenne de 4,5 millions de dollars par année.

Changeons les hypothèses une dernière fois dans notre expérience de pensée.  Supposons que le budget total est dépensé au cours de chacune de ces deux années, utilisez le montant maximal actuellement autorisé de 2,50 $ par déclaration produite et payez-le pour toute déclaration produite (pas seulement celles pour les années d’imposition 2020 et suivantes).  Cela signifie que le PCBMI traiterait en moyenne de 1,8 million de déclarations au cours de chacune des deux prochaines années.  Il s’agit de plus du double de ce qui a été réalisé au cours de la meilleure année à ce jour, la période des impôts de 2019.

Nous croyons qu’il est très peu probable que cela se produise.

Et qu’est-ce que cela signifie pour juger du succès du programme pilote à la fin des trois années ?

Nous prévoyons que le programme pilote terminera ses trois années bien en deçà du budget.  Il y a deux éléments de conception que nous avons énoncés lors du lancement du programme pilote qui sont susceptibles de contribuer à ce résultat : des arrangements administratifs qui sont trop lourds et qui dissuadent certains organismes d’accueil de présenter une demande de subvention, avec des limites de montant de subvention qui sont trop faibles pour servir d’incitatif aux organismes d’accueil.

Si, comme nous le suggérons, le budget du programme pilote sera sous-dépensé, comment l’ARC jugera-t-elle le succès de ce programme ?  Depuis que nous avons publié notre série originale d’articles évaluant le programme pilote, l’ARC a publié quatre mesures en fonction desquelles le programme sera évalué :

  1. augmentation annuelle de 5 % du nombre d’organismes qui participent au programme
  2. diminution annuelle de 10 % du nombre d’organismes qui cessent de participer au programme après deux ans ou moins
  3. augmentation annuelle du nombre de bénévoles associés aux organismes bénéficiaires de subventions
  4. augmentation annuelle du nombre de déclarations produites par les organismes bénéficiaires de subventions

Dans un article sur l’évaluation du programme, nous avions souligné que l’utilisation des mesures de la croissance en tant qu’indicateurs de réussite serait particulièrement trompeuse, car le programme pilote coïncide avec la période qui suit immédiatement la COVID, lorsque les chiffres du PCBMI ont chuté et qu’on pourrait donc s’attendre à ce qu’ils rebondissent de toute façon.

Nous ne croyons pas non plus que l’une ou l’autre de ces mesures vise le véritable objectif du PCBMI.  Comme nous l’avons mentionné dans l’un de nos articles évaluant le programme pilote lors de son  lancement, le PCBMI porte essentiellement sur les niveaux de revenu des clients qu’il dessert.  Ainsi, le programme pilote devrait viser à augmenter le nombre de déclarations produites par un organisme d’accueil pour les clients dont le revenu est égal à ou inférieur au seuil de la pauvreté, et non pas simplement le nombre de déclarations produites ni, d’ailleurs, les organismes d’accueil et les bénévoles engagés dans le PCBMI.   Jusqu’à ce que l’ARC établisse un lien plus étroit entre son PCBMI et les objectifs contenus dans la Stratégie de réduction de la pauvreté du gouvernement fédéral, elle continuera de rater la cible avec des possibilités comme son programme pilote de subventions.

Si l’ARC publie des chiffres pour la deuxième année de ce programme pilote – ce qui n’est pas une donnée puisque l’ARC ne rend pas public toute information sur l’évolution du PCBMI de façon uniforme – nous vous tiendrons au courant.

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